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Je ne sais pas comment vous parler de l'hyperemesis gravidarum

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Avec l'annonce de la nouvelle grossesse de la duchesse de Cambridge, qui souffre encore une fois d'hyperemesis gravidarum (HG), les questions fusent: beaucoup de femmes ont la nausée quand elles attendent un enfant, alors pourquoi parle-t-on autant de Kate?

Que les choses soient claires. Il ne s'agit pas d'une simple nausée, mais d'une nausée sous stéroïdes, version "Hunger Games" où vos adversaires les plus redoutables se sont installés dans votre organisme, et sous votre protection !

L'hyperemesis gravidarum (« la gerbe à répétition de la femme enceinte », en latin) ne se soigne pas à coup de boisson gazeuse et de biscuits salés. Elle est potentiellement mortelle. J'ai du mal à expliquer pourquoi je m'y intéresse, ou quels sont ses symptômes. D'habitude, je sais exprimer mes idées par écrit mais, bizarrement, je ne trouve pas les mots. Pour tout vous dire, je ne sais pas par quel bout prendre le problème. En parler est trop difficile.

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Je ne sais pas comment expliquer que l'hyperemesis gravidarum détruit tout ce qu'il y a de beau et de merveilleux dans une grossesse.

Je ne sais pas comment vous dire que j'avais la hantise de tomber enceinte alors que j'ai désiré chacun de mes enfants.

Je ne trouve pas les mots pour décrire le sentiment de culpabilité et la peine que j'éprouve encore parfois parce que la grossesse me révulse.

Je ne même sais pas si vous pourrez comprendre que mon ventre me torturait pendant des heures quand l'envie me prenait d'avaler un morceau, jusqu'à ce que je n'ai plus rien à vomir.

Ou le courage qu'il faut pour avouer que j'avais envie d'avorter, ou de me foutre en l'air.

Et je ne sais pas comment vous dire qu'il m'était parfois difficile de voir ou d'avoir des nouvelles des femmes enceintes radieuses.

Parce que je sais, JE SAIS BIEN que malgré ça, j'ai eu de la chance : j'ai pu avoir des enfants.

Je ne sais pas comment vous dire qu'en entendant les gens me dire que j'avais de la chance de n'avoir pas pris trop de poids pendant ma grossesse, ou que j'étais resplendissante, j'étais effondrée de voir qu'ils ne rendaient pas compte que j'étais à l'agonie, physiquement et émotionnellement.

Je ne sais pas par où commencer pour exprimer le fardeau que l'hyperemesis gravidarum a fait porter à ma famille, à mon mari et à mes enfants. Je ne pourrai jamais dire à quel point leur détresse m'a consumée.

Je ne sais pas comment vous parler de vomissements si violents qu'on n'arrive plus à respirer.

Je ne sais pas comment vous expliquer que la virulence de ces vomissements et des haut-le-cœur incessants vous épuisent totalement tandis que, prise de vertiges, vous peinez à reprendre votre souffle.

Je ne sais pas comment décrire les phases de nausées incessantes.

Je ne sais pas comment vous faire comprendre qu'au-delà de 24, j'arrêtais de compter les fois où je me précipitais aux toilettes pour vomir, même s'il n'était que midi.

Et je ne sais vraiment pas comment décrire l'état dans lequel vous êtes quand c'est comme ça tous les jours, pendant quarante semaines.

Parce que je sais, JE SAIS BIEN que ça aurait pu être pire : j'ai pu avoir des enfants.

Je ne sais pas si on comprendra que je ne pouvais rien avaler, même si je me forçais, même des biscuits salés, ou des boissons gazeuses, ou n'importe quoi d'autre.

Je ne sais pas si vous avez vraiment envie de savoir que quand quelqu'un me demandait gentiment si j'avais essayé de grignoter un biscuit salé, ou de boire un verre d'eau gazeuse, j'avais envie de lui dire de se le fourrer où je pensais.

Je ne sais pas si j'ai envie qu'on sache que les infirmières essayaient en vain de trouver une veine en bon état sur ma peau déshydratée, même après une douzaine de tentatives. Et pourtant, elles s'y connaissaient.

Je ne sais pas comment vous dire que personne, à part moi, ne doutait une seconde que j'étais totalement impuissante face à l'hyperemesis gravidarum.

Je ne sais pas si je peux expliquer à quel point je me sentais minable de vomir tous les jours et d'avoir des haut-le-cœur incessants.

Je ne sais même pas si le mot « culpabilité » peut évoquer tout le mépris que ma petite personne m'inspirait quand mes bébés avaient des soucis de croissance.

Je ne trouve pas les mots pour décrire l'état de confusion, de dépression et de déchéance physique qu'entraîne la déshydratation. J'étais presque toujours déshydratée.

Et je ne sais pas si j'arrêterai un jour de pleurer en repensant à la peur des conséquences que tout cela pourrait avoir sur mon bébé.

Parce que je sais, JE SAIS SI BIEN que tout s'est bien terminé. J'ai pu tenir mes bébés dans les bras.

Je ne sais pas si je suis prête à répondre à vos questions quand vous vous demandez pourquoi j'ai eu plusieurs enfants si mes grossesses étaient si terribles que ça.

Je ne comprends pas pourquoi vous auriez envie de savoir que j'étais descendue à 38 kilos au 5e mois. Ma peau était jaunâtre, mes organes ne fonctionnaient plus, et j'étais incapable d'avaler quoi que ce soit.

Je ne sais pas si je suis assez forte pour vous dire toutes les choses que mon entourage et les professionnels de santé m'ont dit tandis que je tentais de reprendre pied.

Je ne sais pas quelles histoires vous raconter, que mes tout-petits faisaient semblant de vomir, que je gerbais partout où j'allais quand il m'arrivait de sortir de chez moi, et que je travaillais entre deux passages aux toilettes (quand j'avais la chance de ne pas être complètement à l'ouest).

Je ne sais pas si on comprendra que j'avais des sentiments très partagés vis-à-vis de mon intraveineuse, qui me rappelait chaque jour que j'étais incapable d'avoir des enfants sans elle.

Je ne sais pas comment décrire le goût de la bile, puis du sang, sur ma langue pendant des semaines d'affilée.

Il m'est impossible de décrire la gratitude que je ressens envers ceux qui me croyaient, qui se battaient et prenaient des risques pour moi. Je sais qu'ils m'ont sauvé la vie.

Croyez-moi, je sais, JE SAIS MIEUX QUE PERSONNE que cette agonie s'est bien terminée. Je peux serrer mes bébés contre moi.

Je ne connais pas les mots exacts qui pourraient décrire les effets des sucs gastriques sur ma gorge, mes dents, et mon humeur.

Je ne sais pas comment vous dire à quel point j'ai eu peur, et j'ai toujours peur, que les doses massives de Zofran et de produits qui m'ont été directement injectés dans le sang aient fait du mal à mes enfants.

Je ne sais pas si je peux même évoquer la peur plus grande encore que mes organes défaillants et la cétose leur étaient encore plus nocifs que tous les médicaments.

Je ne sais pas comment raconter la fois où je me suis demandé s'il valait mieux sauver la vie de la mère de mes enfants, ou survivre suffisamment longtemps pour donner naissance à leur petite sœur.

Ou l'angoisse qui me saisit quand je pense que mes filles auront peut-être le même problème quand elles seront enceintes.

Parce que, sachez-le, je sais, JE SAIS BIEN que j'ai une chance inouïe d'avoir des enfants.

Mais je sais aussi ceci : il est indispensable de mieux connaître l'hyperemesis gravidarum, d'aider la recherche et de soutenir les familles frappées par cette maladie. De cela, je suis certaine. Pour en savoir davantage, consultez le site www.famili.fr/.

Vous avez besoin d'aide ? Contactez le Samu en composant le 15 ou le 112, SOS Médecin ou Suicide Ecoute au 01 45 39 40 00.


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