L'annonce, par Google, de l'arrivée, dans un avenir non déterminé, des nanoparticules qui pourraient régler tous nos problèmes de santé, tant sur le plan diagnostic que thérapeutique, a suscité beaucoup de réactions dans la presse. Je ne sais si les nanoparticules vont s'imposer comme technologies dans le diagnostic et le traitement des maladies ni dans quelle mesure elles auront l'impact annoncé.
Il en est de même pour les multiples nouveautés annoncées en 2014 : cœur artificiel, œil bionique, ingénierie des gènes, imprimantes 3D pour créer des vaisseaux sanguins et des cellules cutanées ou même un foie... Le futur est imprévisible. Ce que je crois pouvoir affirmer, c'est que le temps entre le concept d'une approche diagnostique ou thérapeutique et son application peuvent se chiffrer en décennies et que les pièges au cours du développement sont nombreux. Dans tous les cas les coûts sont faramineux avec des risques d'échecs pouvant éliminer 90% des technologies testées: inefficacité ou effets secondaires rédhibitoires en ce qui concerne les médicaments, imprécision et augmentation inacceptable du nombre de personnes testées positives alors qu'elles n'ont pas la maladie pour un test diagnostic. Les coûts de ces traitements pourraient également atteindre des niveaux tels qu'ils seraient inaccessibles au remboursement par la sécurité sociale dans nos pays et favoriser encore l'arrivée annoncée d'un modèle de médecine dite 'à deux vitesses'.
Ce qui se passera dans le domaine de la santé dans les années à venir ne dépend pas de technologies futuristes dont l'avènement est plus qu'aléatoire. La santé de demain dépend des choix que nous faisons aujourd'hui du modèle de société, solidaire ou non, dans lequel nous souhaitons vivre. Ce choix est nécessaire et possible.
Nécessaire parce qu'on ne peut imaginer une société équilibrée qui ne tienne pas compte des besoins de base de chacun et offre à tous éducation et santé. Des inégalités il y en aura mais elles ne peuvent pas descendre sous un seuil qui ne donnerait pas à chaque personne la possibilité de rêver sa vie heureuse. Même aux USA, une couverture santé est devenue accessible aux plus de quarante millions d'Américains pour qui elle était trop coûteuse.
Possible parce que les moyens pour y parvenir sont raisonnablement simples à mettre en œuvre et que les résultats déjà obtenus démontrent leur efficacité en termes de réduction de mortalité et de coûts. Le principe implique qu'il faut repenser notre système de santé, globalement,
La maîtrise nécessaire des coûts qui est actuellement le souci principal de nos politiques, viendra d'une réduction des traitements inutiles et des complications dues aux traitements administrés dans des conditions non optimales ainsi que d'une diminution rapide de l'incidence et de la mortalité des affections au stade où elles sont les plus coûteuses.
À titre d'exemple, la prise des mesures interdisant le tabac dans les lieux publics a, dans l'année qui a suivi, entraîné une réduction significative des décès par infarctus. En Belgique, de 2006 à 2009 elle a permis d'éviter 425 décès par infarctus chaque année. Depuis 1980, les taux de mortalité par crises cardiaques et accidents vasculaire cérébraux ont régressés de deux tiers, voire plus, dans presque tous les pays de l'OCDE. D'après les auteurs du rapport, plusieurs facteurs concourent à expliquer cette baisse, parmi lesquels, évidemment, le recul du tabagisme, mais aussi les progrès significatifs réalisés dans le traitement de ces pathologies. L'impact économique de cette réduction n'a, à ma connaissance, pas été évalué, mais devrait être considérable puisqu'il s'agit à la fois d'une réduction du coût des soins dispensés à des malades lourds et en même temps du maintien des personnes en tant qu'acteurs de la vie économique par leur travail et/ou par leur consommation.
Un autre exemple que je trouve aussi spectaculaire est la chute de la mortalité par cancer aux États-Unis qui suggère que la mortalité, qui était, selon le type de cancer, de 40-100/100.000 personnes en 1980 pourrait tomber à 5/100.000 entre 2035-2050. (Figure 1). La même tendance est observée en Europe. Ici aussi l'impact économique mériterait d'être évalué.
L'avenir est imprévisible et ce qu'annonce la recherche sur les nanoparticules reste encore du domaine de la fiction. Le choix de la société et du type d'organisation médicale qui pourront accueillir les nouvelles technologies dépend de nous dès aujourd'hui. Des mesures, comme celles de l'interdiction du tabac ont montré que l'effet sur la santé est rapide et mesurable dans l'année qui suit leur mise en application. Une vision globale sur l'avenir de notre système de santé est nécessaire et au-delà des mesures budgétaires visant à réduire les coûts, réorganiser la distribution des soins de santés en la fondant sur la qualité et donner la priorité à la prévention est indispensable.
Je remercie Ann Vandevelde et Emmanuel Hollander pour leurs corrections et commentaires
Il en est de même pour les multiples nouveautés annoncées en 2014 : cœur artificiel, œil bionique, ingénierie des gènes, imprimantes 3D pour créer des vaisseaux sanguins et des cellules cutanées ou même un foie... Le futur est imprévisible. Ce que je crois pouvoir affirmer, c'est que le temps entre le concept d'une approche diagnostique ou thérapeutique et son application peuvent se chiffrer en décennies et que les pièges au cours du développement sont nombreux. Dans tous les cas les coûts sont faramineux avec des risques d'échecs pouvant éliminer 90% des technologies testées: inefficacité ou effets secondaires rédhibitoires en ce qui concerne les médicaments, imprécision et augmentation inacceptable du nombre de personnes testées positives alors qu'elles n'ont pas la maladie pour un test diagnostic. Les coûts de ces traitements pourraient également atteindre des niveaux tels qu'ils seraient inaccessibles au remboursement par la sécurité sociale dans nos pays et favoriser encore l'arrivée annoncée d'un modèle de médecine dite 'à deux vitesses'.
Lire aussi:
Ce qui se passera dans le domaine de la santé dans les années à venir ne dépend pas de technologies futuristes dont l'avènement est plus qu'aléatoire. La santé de demain dépend des choix que nous faisons aujourd'hui du modèle de société, solidaire ou non, dans lequel nous souhaitons vivre. Ce choix est nécessaire et possible.
Nécessaire parce qu'on ne peut imaginer une société équilibrée qui ne tienne pas compte des besoins de base de chacun et offre à tous éducation et santé. Des inégalités il y en aura mais elles ne peuvent pas descendre sous un seuil qui ne donnerait pas à chaque personne la possibilité de rêver sa vie heureuse. Même aux USA, une couverture santé est devenue accessible aux plus de quarante millions d'Américains pour qui elle était trop coûteuse.
Possible parce que les moyens pour y parvenir sont raisonnablement simples à mettre en œuvre et que les résultats déjà obtenus démontrent leur efficacité en termes de réduction de mortalité et de coûts. Le principe implique qu'il faut repenser notre système de santé, globalement,
- en réorganisant la distribution des soins en la fondant sur la qualité,
- en favorisant la prévention et en développant des technologies hautement efficaces mais à faible coût pour la détection précoce des maladies et la conservation d'un bon état de santé.
La maîtrise nécessaire des coûts qui est actuellement le souci principal de nos politiques, viendra d'une réduction des traitements inutiles et des complications dues aux traitements administrés dans des conditions non optimales ainsi que d'une diminution rapide de l'incidence et de la mortalité des affections au stade où elles sont les plus coûteuses.
À titre d'exemple, la prise des mesures interdisant le tabac dans les lieux publics a, dans l'année qui a suivi, entraîné une réduction significative des décès par infarctus. En Belgique, de 2006 à 2009 elle a permis d'éviter 425 décès par infarctus chaque année. Depuis 1980, les taux de mortalité par crises cardiaques et accidents vasculaire cérébraux ont régressés de deux tiers, voire plus, dans presque tous les pays de l'OCDE. D'après les auteurs du rapport, plusieurs facteurs concourent à expliquer cette baisse, parmi lesquels, évidemment, le recul du tabagisme, mais aussi les progrès significatifs réalisés dans le traitement de ces pathologies. L'impact économique de cette réduction n'a, à ma connaissance, pas été évalué, mais devrait être considérable puisqu'il s'agit à la fois d'une réduction du coût des soins dispensés à des malades lourds et en même temps du maintien des personnes en tant qu'acteurs de la vie économique par leur travail et/ou par leur consommation.
Un autre exemple que je trouve aussi spectaculaire est la chute de la mortalité par cancer aux États-Unis qui suggère que la mortalité, qui était, selon le type de cancer, de 40-100/100.000 personnes en 1980 pourrait tomber à 5/100.000 entre 2035-2050. (Figure 1). La même tendance est observée en Europe. Ici aussi l'impact économique mériterait d'être évalué.
Figure 1 : Mortalité pour une sélection de cancers aux USA, 1930-2010
L'avenir est imprévisible et ce qu'annonce la recherche sur les nanoparticules reste encore du domaine de la fiction. Le choix de la société et du type d'organisation médicale qui pourront accueillir les nouvelles technologies dépend de nous dès aujourd'hui. Des mesures, comme celles de l'interdiction du tabac ont montré que l'effet sur la santé est rapide et mesurable dans l'année qui suit leur mise en application. Une vision globale sur l'avenir de notre système de santé est nécessaire et au-delà des mesures budgétaires visant à réduire les coûts, réorganiser la distribution des soins de santés en la fondant sur la qualité et donner la priorité à la prévention est indispensable.
Je remercie Ann Vandevelde et Emmanuel Hollander pour leurs corrections et commentaires