Depuis octobre 2014, Pôle emploi a créé le principe des droits rechargeables. Le principe est simple : plus une personne travaille, plus elle a des droits à l'Assurance chômage. Sur le papier, c'était plutôt une bonne idée. Mais Pôle emploi n'a, semble-t-il, pas réfléchi à l'évolution des pratiques d'embauche.
Le site de Pôle emploi explique :
Les limites des « droits rechargeables » de Pôle emploi
Mon cas personnel démontre la limite de cette nouvelle réglementation. Je suis une jeune journaliste de 27 ans. Après des études en apprentissage avec une école de journalisme parisienne, je me retrouve, comme beaucoup de mes pairs, au chômage pour la première fois en janvier 2013. Mon statut d'apprentie pendant deux ans me donne droit à l'allocation chômage, basée sur mon salaire qui était à l'époque de 1200 euros environ, soit 800 euros d'allocation. Après quelques piges par ci par là, et des projets bénévoles, je suis embauchée pour un CDD de trois mois dans une grosse entreprise de presse. L'idée est de ne pas me désinscrire de Pôle emploi pour continuer à toucher ces 800 euros salutaires à la fin de mon CDD. Retour au chômage en septembre 2013. Au bout de quelques semaines de recherche, je décroche un mini jackpot, à mon petit niveau : un CDD d'un an et trois mois dans un journal local d'Ile-de-France, payé 2800 euros brut par mois. Remplaçante de deux congés maternité successifs, je retourne à la case Pôle emploi en janvier 2015 car il n'y a pas d'embauche possible. Mes droits à l'allocation viennent de tomber : 28,38 euros par jour. Soit le montant qui m'était dû à la fin de mes deux ans d'apprentissage au SMIC... Pour faire simple, je ne toucherai les 1450 euros net de chômage qui étaient indiqués sur la simulation Pôle emploi (pas mise à jour à l'heure actuelle) qu'au bout de la fin des 17 mois de droits au chômage de mon expérience d'apprentie terminée en 2013 ! Autant dire jamais.
Edit : Noté en minuscule au bas de la lettre qui m'annonce le principe des droits rechargeables, Pôle emploi m'informe après coup que « si mes droits ont été ouverts à la suite d'un contrat d'apprentissage », je bénéficie d'un droit d'option et peux choisir entre continuer de percevoir mes droits restants ou bénéficier d'une nouvelle ouverture de droit, liée à mon dernier contrat. Trop aimable. Mais qu'en est-il des autres, piégés entre le tout premier CDD sous-payé et leur dernier emploi, peut-être un peu plus avantageux qu'un SMIC ?
Et si les droits rechargeables sont intéressants pour certains cas de figure, cette nouvelle règle n'est-elle pas l'aveu d'une situation si misérable, qu'on préfère accommoder les conditions de l'allocation chômage plutôt que de mettre en œuvre un système qui permet réellement de reprendre pied sur le marché du travail ? CDI, qu'êtes-vous devenus ?Pôle emploi ignore-t-il la complexité du marché du travail pour les jeunes, en 2015 ? Les CDI ont disparu de la circulation depuis belle lurette. Enchaîner les CDD fait partie du « plan de carrière » de la plupart des jeunes journalistes... On se souvient du témoignage de Funambule, journaliste en CDD à France Télévisions depuis 10 ans, paru dans l'Humanité en juillet 2014. Cela ne concerne malheureusement pas que mon domaine d'activité.
Une étude du ministère du Travail (Dares), publiée en juillet dernier, démontre qu'entre 2000 et 2012, les embauches en CDD ont bondi de 76%. Au total en 2012, plus de neuf embauches sur dix ont été faites en CDD (49%) ou en intérim (42%). Et celles-ci se font sur des durées de plus en plus courtes. Les contrats temporaires concernent principalement les jeunes salariés et les professions peu qualifiées. Cochez la case vous concernant. À l'inverse, que dire de ces employeurs qui voient l'enchainement de CDD comme de l'instabilité, ou au contraire, la preuve de votre médiocrité car personne ne vous garde, que penser de la situation de cette amie qui remplace un congé maladie depuis maintenant un an, à coups de contrats de trois mois avec délais de carence ? Expliquez-moi comment avancer avec le CDD, si nous devons nous en contenter jusqu'au jour de notre retraite. Faire un prêt, acheter un appartement, payer des études pour nos enfants, mettre de côté pour s'offrir une place confortable en maison de retraite... Ah ! Mais vous êtes jeunes ! Vous n'avez pas à penser à tout ça. Sauf qu'à mon âge, mes parents avaient déjà trois enfants, une voiture et un toit partiellement à eux sur leur tête. Moi aussi, j'ai envie de m'endetter sur 15 ans pour acheter un 25 m2. Je rêve de plan plan, de concret, de projets mais avant tout de vivre correctement de ce métier que j'adore.
Place aux jeunes !
Loin de pratiquer le jeunisme primaire, j'aimerais qu'on m'explique pourquoi, dans la plupart de nos grandes rédactions, chaînes et radios françaises, des « vieux de la vieille » sont toujours en poste, bloquant le roulement nécessaire à l'embauche des jeunes journalistes. Qui sont ces vieux briscards qui n'interviennent qu'une fois par mois pour faire une interview, un seul reportage, et touchent leur chèque à la fin du mois, tandis qu'une horde de jeunes loups aux dents longues se les cassent sur leur précarité forcée ?
Je sais - j'espère du moins - que je ne resterai pas au chômage bien longtemps, qu'un nouveau CDD pointera le bout de son nez dans deux, trois mois, et me permettra de combler le découvert accumulé sur mon compte pendant la petite période de galère habituelle. Combien de fois m'a-t-on dit, en rendez-vous en agence : « Vous n'avez pas vraiment besoin de nous, vous ne faites pas partie de la cible de Pôle emploi. Votre CV est bon, bien fait. Vous avez Bac +5, 4 ans d'expérience. » Peut-être et tant mieux. Mais pour une fois, j'aurais bien aimé qu'on prenne en compte ma situation pas si exceptionnelle lors du brainstorming « Droits rechargeables ».
Allez, rassurez-vous, les prochaines Journées du bonheur au travail ont lieu du 12 au 14 février...
Le site de Pôle emploi explique :
« Avec les droits rechargeables, tout demandeur d'emploi qui retravaille voit sa durée d'indemnisation rallongée. Une fois tous les droits initiaux du demandeur d'emploi utilisés, et seulement à ce moment là, il va être effectué un « rechargement » des droits qu'il a acquis en travaillant pendant la période d'indemnisation. Ce rechargement lui ouvre de nouveaux droits, c'est-à-dire une allocation d'un nouveau montant pour une nouvelle durée qui sera calculée sur la base des activités reprises. »
Les limites des « droits rechargeables » de Pôle emploi
Mon cas personnel démontre la limite de cette nouvelle réglementation. Je suis une jeune journaliste de 27 ans. Après des études en apprentissage avec une école de journalisme parisienne, je me retrouve, comme beaucoup de mes pairs, au chômage pour la première fois en janvier 2013. Mon statut d'apprentie pendant deux ans me donne droit à l'allocation chômage, basée sur mon salaire qui était à l'époque de 1200 euros environ, soit 800 euros d'allocation. Après quelques piges par ci par là, et des projets bénévoles, je suis embauchée pour un CDD de trois mois dans une grosse entreprise de presse. L'idée est de ne pas me désinscrire de Pôle emploi pour continuer à toucher ces 800 euros salutaires à la fin de mon CDD. Retour au chômage en septembre 2013. Au bout de quelques semaines de recherche, je décroche un mini jackpot, à mon petit niveau : un CDD d'un an et trois mois dans un journal local d'Ile-de-France, payé 2800 euros brut par mois. Remplaçante de deux congés maternité successifs, je retourne à la case Pôle emploi en janvier 2015 car il n'y a pas d'embauche possible. Mes droits à l'allocation viennent de tomber : 28,38 euros par jour. Soit le montant qui m'était dû à la fin de mes deux ans d'apprentissage au SMIC... Pour faire simple, je ne toucherai les 1450 euros net de chômage qui étaient indiqués sur la simulation Pôle emploi (pas mise à jour à l'heure actuelle) qu'au bout de la fin des 17 mois de droits au chômage de mon expérience d'apprentie terminée en 2013 ! Autant dire jamais.
Edit : Noté en minuscule au bas de la lettre qui m'annonce le principe des droits rechargeables, Pôle emploi m'informe après coup que « si mes droits ont été ouverts à la suite d'un contrat d'apprentissage », je bénéficie d'un droit d'option et peux choisir entre continuer de percevoir mes droits restants ou bénéficier d'une nouvelle ouverture de droit, liée à mon dernier contrat. Trop aimable. Mais qu'en est-il des autres, piégés entre le tout premier CDD sous-payé et leur dernier emploi, peut-être un peu plus avantageux qu'un SMIC ?
Et si les droits rechargeables sont intéressants pour certains cas de figure, cette nouvelle règle n'est-elle pas l'aveu d'une situation si misérable, qu'on préfère accommoder les conditions de l'allocation chômage plutôt que de mettre en œuvre un système qui permet réellement de reprendre pied sur le marché du travail ? CDI, qu'êtes-vous devenus ?Pôle emploi ignore-t-il la complexité du marché du travail pour les jeunes, en 2015 ? Les CDI ont disparu de la circulation depuis belle lurette. Enchaîner les CDD fait partie du « plan de carrière » de la plupart des jeunes journalistes... On se souvient du témoignage de Funambule, journaliste en CDD à France Télévisions depuis 10 ans, paru dans l'Humanité en juillet 2014. Cela ne concerne malheureusement pas que mon domaine d'activité.
Une étude du ministère du Travail (Dares), publiée en juillet dernier, démontre qu'entre 2000 et 2012, les embauches en CDD ont bondi de 76%. Au total en 2012, plus de neuf embauches sur dix ont été faites en CDD (49%) ou en intérim (42%). Et celles-ci se font sur des durées de plus en plus courtes. Les contrats temporaires concernent principalement les jeunes salariés et les professions peu qualifiées. Cochez la case vous concernant. À l'inverse, que dire de ces employeurs qui voient l'enchainement de CDD comme de l'instabilité, ou au contraire, la preuve de votre médiocrité car personne ne vous garde, que penser de la situation de cette amie qui remplace un congé maladie depuis maintenant un an, à coups de contrats de trois mois avec délais de carence ? Expliquez-moi comment avancer avec le CDD, si nous devons nous en contenter jusqu'au jour de notre retraite. Faire un prêt, acheter un appartement, payer des études pour nos enfants, mettre de côté pour s'offrir une place confortable en maison de retraite... Ah ! Mais vous êtes jeunes ! Vous n'avez pas à penser à tout ça. Sauf qu'à mon âge, mes parents avaient déjà trois enfants, une voiture et un toit partiellement à eux sur leur tête. Moi aussi, j'ai envie de m'endetter sur 15 ans pour acheter un 25 m2. Je rêve de plan plan, de concret, de projets mais avant tout de vivre correctement de ce métier que j'adore.
Place aux jeunes !
Loin de pratiquer le jeunisme primaire, j'aimerais qu'on m'explique pourquoi, dans la plupart de nos grandes rédactions, chaînes et radios françaises, des « vieux de la vieille » sont toujours en poste, bloquant le roulement nécessaire à l'embauche des jeunes journalistes. Qui sont ces vieux briscards qui n'interviennent qu'une fois par mois pour faire une interview, un seul reportage, et touchent leur chèque à la fin du mois, tandis qu'une horde de jeunes loups aux dents longues se les cassent sur leur précarité forcée ?
Je sais - j'espère du moins - que je ne resterai pas au chômage bien longtemps, qu'un nouveau CDD pointera le bout de son nez dans deux, trois mois, et me permettra de combler le découvert accumulé sur mon compte pendant la petite période de galère habituelle. Combien de fois m'a-t-on dit, en rendez-vous en agence : « Vous n'avez pas vraiment besoin de nous, vous ne faites pas partie de la cible de Pôle emploi. Votre CV est bon, bien fait. Vous avez Bac +5, 4 ans d'expérience. » Peut-être et tant mieux. Mais pour une fois, j'aurais bien aimé qu'on prenne en compte ma situation pas si exceptionnelle lors du brainstorming « Droits rechargeables ».
Allez, rassurez-vous, les prochaines Journées du bonheur au travail ont lieu du 12 au 14 février...
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