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Ce que je dis à ceux qui pensent que nous n'avons pas d'avenir

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PSYCHO - Dans un entretien croisé du Figaro du 25 Mars, nous trouvons une conversation entre Michel Onfray et François-Xavier Bellamy. La question qui nourrit l'imaginaire des hantés est "Vivons-nous la fin de notre civilisation?"

Ce que nous voyons, c'est que de plus en plus d'adultes tiennent à parler de la fin de la civilisation. Cela ne me dérange nullement. Ce qui me dérange c'est la réponse que fait Michel Onfray à la question d'un des journalistes "Que dire à un jeune de 20 ans?": "Le bateau coule. Restez élégant. Mourrez debout...".

Voilà une perspective, fruit d'un discours pauvre, triste, noyé dans la haine froide. Un discours de désespéré. Cette façon philosophique de s'exprimer c'est la manière trouvée par quelques-uns pour actualiser leur fantasme de mort tout en angoissant celles et ceux qui ne sont pas prémunis contre ces discours de vipères: l'homme est "le fruit de l'anus du diable", attention au "méchant loup", nous allons "tous crever", le pays "est foutu". C'est le fantasme typique du névrosé, ce tyran domestique qui, grâce aux médias, terrorise aussi les jeunes gens. Cela me fait penser à cette comptine qui nourrissait mon enfance et qui a produit en moi une peur durable.

Le monde est et avancera sans les idolâtres du bonheur et du malheur


Proclamer des fins du monde est un discours qui sort de la bouche d'un vieil ado. Ce qui me semble c'est que, si fin il y a, c'est bien celle de son adolescence à lui. C'est la fin de sa récré. Bien venu au monde réel, mon petit Michel.

Je tiens à dire que les gens de 20 ans ne sont pas obligés d'être d'accord avec un tel discours de plombeur car depuis quelques temps maintenant, un certain nombre de personnes cherchent à persuader leurs semblables que c'est la fin de notre civilisation, la fin de notre monde, la fin de la France.

Je me suis déjà rebellé contre un psychanalyste, il y a quelques années, qui avait défendu ces propos quand Onfray n'occupait pas encore le paysage télévisuel. Il parlait de la mort du divan. J'avais lu son livre, comme j'ai lu aussi le crépuscule de l'enfance de l'adolescence d'Onfray, son livre soi-disant sur Freud, le père de la psychanalyse. Mon interprétation était très simple dans les deux cas. Dans le premier, le monsieur, psychanalyste de surcroît, parlait de la fin du divan, je lui ai dit que c'était la fin de sa propre vie qu'il projetait sur la psychanalyse. Maintenant c'est Onfray qui passe ce message, par le biais de cet article, à la jeunesse quand c'est plus de son état à lui qu'il parle que de celui de la France.

Michel Onfray me donne l'impression d'être un triste et cela ne me dérange nullement. Ses textes, comme ceux d'autres penseurs de notre actualité, continuent à attirer mon attention. Je les lis avec attention, curiosité et respect.

Mais le Monsieur ne me donne pas l'impression d'être très copain avec la joie. Il n'est pas du tout freund Comme on dit en allemand, la langue de Freud. Nous ne pouvons pas exclure cette dimension de l'histoire de chacun dans sa manière de lire le monde. Et la manière de lire le monde d'Onfray est hyper-plombante. Pas pour moi, psychanalysé et dépossédé de mes haines, tristesses et angoisses.

Il y a des gens comme ça. Ils vivent chichement la joie. Ce n'est pas un crime de lèse-majesté, ce n'est pas non plus grave. Pour l'église catholique c'est un péché. Pour Spinoza c'était une faute


Lecteur d'Onfray et d'Apollinaire, je pense qu'Apollinaire est beaucoup plus intéressant à lire qu'Onfray. Pour quelle raison? Parce que Apollinaire défend l'idée qu'un poète est celui qui découvre de nouvelles joies, fussent-elles pénibles à supporter. J'ai lu ça dans un document fort intéressant, la revue Virgule n°127, page 16. Il faut dire qu'il s'agit d'un "magazine de français et de littérature pour les 10/15 ans". Un magazine fait sur mesure pour quelqu'un de mon âge, nul doute là-dessus. Moi, plombé par les plombeurs qui m'accablaient dans la jeunesse, au nom du Christ, de la Patrie, de la psychanalyse.

Aujourd'hui, je ne peux pas laisser un tristounet accabler celles et ceux qui commencent l'expérience de la vie, et réussissent. La preuve? Hier, à la réunion de supervision du SETU?, les cliniciens m'ont confié qu'ils avaient entre 23 et 25 ans quand ils ont commencé à travailler au RPH. Aujourd'hui, à presque 30 ans, ils gagnent correctement leur vie tout en s'engageant avec les français les plus démunis. Une autre preuve? Les membres cliniciens du RPH ont déclaré pour 2014, ensemble, 500.891 euros au FISC.

Au début du gouvernement Hollande, comme au début de chaque nouveau quinquennat, sans jamais me désespérer, j'avais dit aux fonctionnaires rencontrés qu'il était possible de donner une perspective d'emploi aux jeunes cliniciens et de faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat tout en proposant des consultations avec des psychanalystes à la population défavorisée. Nous sommes 14 cliniciens et nous déclarons un demi-million. Imaginons si le projet RPH-Ecole de psychanalyse s'étend...

Cependant, quelques-uns semblent parier sur le nivèlement par le bas du pays et des mentalités. A bas les bonnes manières, le latin, le grec. Vive le semblant du vivre-ensemble


Je ne fais pas dans l'idéologie, puisque j'apporte les preuves, sociales, économiques et humaines de cette expérience qui a pour nom, psychanalyse. C'est un pari prouvé par mon expérience de clinicien et de formateur de jeunes cliniciens.

Mes maîtres à penser sont joyeux, sont contents. Honte à un vieux triste de passer ce message au jeunes gens: "Le bateau coule. Restez élégant. Mourrez debout ".

Honte à toi, Michel! C'est ma réponse: honte à toi!


Maintenant voici mon message pour les jeunes de 20 ans: à cette jeune femme de 23 ans qui est venue me rendre visite aujourd'hui-même à 7h du matin, qui m'avait dit que ça ne valait pas la peine d'être là. Je l'interroge:

- Là, où?

- Ici.

- Où?

- Dans ce cabinet.

- Pour quelle raison?

- Parce que ça n'avance pas dit-elle.

Je lui demande:

- "Depuis combien de temps venez-vous me rendre visite?

- Ça fera bientôt 9 mois.

- Et depuis 9 mois, rien n'a changé du tout? Vous qui venez me voir deux fois par semaine. [et qui me payez 10€ -information pour celles et ceux qui pensent que les psychanalystes sont des bourgeois qui ne reçoivent que des argentés].


Elle me dit qu'elle est moins angoissée. Je lui réponds que cela me suffit largement pour justifier nos rendez-vous hebdomadaires.

Elle continue à associer librement, selon la règle freudienne, celle-là même enseignée par Madame Emmy au Docteur Freud, celui-là même que, méchamment, Onfray accable, muni des informations offertes par les ennemis du désir décidé.

Onfray ne comprend pas la psychanalyse, ce qui est normal n'étant ni psychanalysant ni clinicien. Il se comporte comme un haineux qui déverse sa colère sur la clinique du désir. Qu'il déverse sa haine sur des adultes, cela ne me dérange pas. Qu'il touche à la jeunesse, cela me dérange davantage.

Revenons à la jeune femme, en sortant elle fait un lapsus et dans cette joie qui fait aussi partie de l'inconscient, elle fait un petit sourire, son sourire grandit et devant moi, son visage s'illumine. C'est ça la psychanalyse de Freud, c'est dévoiler à l'homme son désir. Onfray n'est pas assez courageux pour savoir sur son désir. Il fait lui-même sa psychanalyse, de manière sauvage, en public, où il est, pour reprendre Hegel, maître et esclave. Il tacle tout le monde, dans tous les sens, un révolté, voire désespéré. Et c'est regrettable pour nous tous.

Ce que je dis au jeunes gens c'est que le bateau coule parce que c'est la nature même de notre bateau de couler


Ce qui me dérange, c'est que quelqu'un qui n'est pas content d'être là puisse essayer d'éclabousser la jeunesse avec sa haine travestie en tristesse publique.

Oui, jeunesse de France et d'ailleurs, le bateau coule. D'ailleurs, il coule depuis que vous êtes nés, mais ce n'est pas un problème. Ecopez mais faites-le avec élégance, pas de manière effrayée. Ne mourrez pas debout parce que personne ne meurt debout, c'est une connerie de vieux con assis, bien assis.

Vivez debout, ça c'est une belle manière de vivre!

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