Quantcast
Channel: France C'est La Vie - The Huffington Post
Viewing all articles
Browse latest Browse all 7372

Le pape François peut-il faire avancer la cause des femmes?

$
0
0
En ce 8 mars, journée des femmes, à la veille du premier anniversaire de son élection, le 13 mars, le pape François a-t-il honoré la cause des femmes? Quel est le bilan de l'année? Que peut-il faire?

Du côté de ce qui s'est déjà fait, le bilan est en demi-teinte. Le pape a exprimé la volonté de promouvoir une "théologie de la femme" (dont on peut se demander ce qu'elle recouvre), et il a consacré deux paragraphes de son Exhortation apostolique de novembre 2013 sur le sujet, invitant à: "encore élargir les espaces pour une présence féminine plus incisive dans l'Église."

Si, dans son propos, il ne remet pas en cause le privilège masculin de la prêtrise, il entend distinguer "la puissance sacramentelle d'avec le pouvoir". En clair: être prêtre ne donnera pas automatiquement le pouvoir, et les prêtres pourraient ne plus être les seuls à l'exercer. C'est une manière habile de dénouer une situation bloquée, en relativisant un vieux principe qui a fait son temps (11e siècle) qui veut que tout pouvoir soit réservé aux prêtres. Cette dissociation permettrait aux femmes d'accéder à des responsabilités, non seulement "techniques", comme les finances, ou la communication, mais à de vrais ministères d'annonce de l'Évangile.

Malheureusement, ces propos ont été suivis d'un splendide rétropédalage, quand le pape a dit que nommer des femmes cardinales était "une plaisanterie, que les femmes avaient besoin d'être valorisées, et non cléricalisées". Patatras! "Plaisanterie", c'est peu de le dire quand on sait que le Code de droit canonique de 1983 a réservé le cardinalat aux prêtres, alors qu'auparavant, il était accessible aux laïcs! Or, le cardinalat est essentiel. Il délimite le "premier cercle", celui de la confiance donnée, des compétences et des responsabilités reconnues, en particulier celle d'élire le pape. Tant qu'il ne sera pas accessible aux femmes, la discrimination règnera. Rappelons, par exemple, que le patriarche de l'Église orthodoxe russe est élu par un collège de près de six cent personnes où figurent des laïcs, hommes et femmes.

Cette formule lapidaire du pape, outre qu'elle est un peu humiliante (on se penche sur ces pauvres femmes), porte en elle une certaine violence, car elle installe une sorte de double bind, une double contrainte insoluble : d'un côté toutes les fonctions essentielles de l'Église sont "cléricales", de l'autre, c'est une plaisanterie d'y mettre des femmes. Serait-ce une fin de non-recevoir?

Je pense que c'est François le rusé qui a parlé. Car le pape a dû vite apprendre à compter ses amis et ses ennemis. Il hérite d'une administration frileuse, rongée par les coteries et peut-être rétive à collaborer. Aussi, il se doit de rassurer, de circonvenir ses ennemis, afin d'en avoir... le moins possible. Deux exemples: la discussion entre les cardinaux au sujet des divorcés remariés, les 20 et 21 février, a fait apparaître des divergences. Si elles sont réelles, c'est déjà un problème; si elles sont simulées, c'est pire, car cela traduirait un climat d'hostilité sourde. Par ailleurs, la réforme de la Curie est maintenant bien engagée, avec la nomination du cardinal Pell, l'un du C8, comme président du Secrétariat pour l'économie, mais le plus dur est à venir. Il va falloir rationaliser, supprimer des doublons, comme dans une fusion d'entreprises; cela va tanguer. Ce n'est donc pas le moment d'ouvrir de nouveaux fronts. Aussi, les innovations au sujet des femmes, sous la forme institutionnelle, au moins, ne sont pas pour demain, même si l'on peut regretter que des femmes diacres ne soient pas rapidement reconnues, pour les nombreux services déjà rendus, en particulier par les religieuses, auprès des meurtris de la vie.

Il existe pourtant deux manières d'avancer, plus latérales. La première est de lancer un train qui en cacherait un autre. Ce scénario est en cours. Le cardinal Oscar Maradiaga a annoncé que le pape souhaite la création d'une Congrégation des laïcs (il n'existe encore qu'un Conseil pontifical pour les laïcs). Il comporterait donc des hommes... et des femmes. Ainsi la forteresse catholique, masculine et romaine, céderait, (à terme !), comme Troie, pour avoir accueilli en son sein un grand cheval de bois rempli de laïcs.

L'autre solution serait que le pape use de son pouvoir régalien pour confier à des femmes, d'une part des responsabilités éminentes durables, telles que devenir nonce, diriger un conseil pontifical ou même un dicastère, et qu'il leur marque aussi sa reconnaissance par des fonctions ponctuelles à valeur symbolique. Si, par exemple, il dialoguait avec une femme comme il l'a fait avec le directeur de La Repubblica, ou s'il confiait la prédication de sa retraite de carême à une femme, montrant par là que le pape peut être enseigné par une femme, il ferait beaucoup pour casser des stéréotypes machistes en vigueur dans l'institution ecclésiale.

Reste l'ultime question, celle de savoir si la volonté du pape est réelle sur le sujet. Nul ne peut le certifier, mais une chose commence à se savoir: ce que ce le pape dit, il le fait.

Lire aussi:
La tribune de Pauline Bebe, première femme rabbin de France, sur la place de la femme dans la religion juive


Découvrez d'autres articles santé, alimentation, tendances et sexualité dans notre rubrique C'est la vie.


Pour suivre les dernières actualités en direct, cliquez ici.


Retrouvez les articles du HuffPost C'est la vie sur notre page Facebook.

Pour suivre les dernières actualités en direct, cliquez ici.

Viewing all articles
Browse latest Browse all 7372

Trending Articles



<script src="https://jsc.adskeeper.com/r/s/rssing.com.1596347.js" async> </script>